Faites-vous entendre !

Voici une lettre type idéale pour faire part de votre désaccord vis-à-vis des brevets sur les logiciels. Pour faire entendre votre voix, envoyez-la signée et modifiée selon vos préférences aux instances nationales et européennes (ministères, Commission européenne, homme politiques...).

Une version plus complète de cette lettre est disponible sur http://swpat.ffii.org/

où vous trouverez également une pétition à signer.

Envoyer vos pétitions à :

l'Union Européenne

200 rue de la loi

B 1049 - BRUXELLES

Belgique

Monsieur,

Depuis ces derniers mois et dernières années, vous avez maintes fois exprimé publiquement vos craintes concernant le danger de monopolisation dans le domaine du logiciel. Encore au début du mois de mai, lors de la conférence des cartels de Berlin, vous avez mentionné l'exemple de Microsoft et vous avez démontré justement que ce n'est pas la taille de l'entreprise, mais la domination sur les jonctions de communication qui présente un danger. Vous nous assuriez que votre institution s'appliquerait à observer attentivement ce danger.

Hélas, il semble qu'au sein de l'UE, certains collègues ne partagent pas votre conscience du danger. La commission de l'UE prévoit en ce moment des mesures qui risquent d'aggraver encore plus les tendances de monopolisation du logiciel déjà existantes et très désavantageuses pour les Européens.

Le 24 juin, une proposition de loi devait être présentée lors de la conférence sur la propriété intellectuelle à Paris introduisant ainsi en Europe un système de "brevets de logiciel" à l'américaine.

Si, depuis ces dernières décennies, on constate un durcissement accru de la monopolisation, c'est parce que les firmes de logiciels, contrairement aux firmes traditionnelles de publication ou aux firmes industrielles, emploient beaucoup de mesures protectrices en même temps, comme par exemple :

1. droits d´auteur et restrictions d'utilisation en résultant (par exemple, interdiction de copie et interdiction de développement)

2. secret d'entreprise (retenue des sources, utilisation de formats de données insondables, etc.)

3. stratégie de plate-forme (lier entre eux des systèmes de nature différente en une plate-forme commune, limiter l'interopérabilité et, par là, limiter la possibilité des fabricants indépendants d'entrer en concurrence grâce à leur compétence technique)

Si l'on ajoute à cela des brevets sur les méthodes de programmation pour une protection supplémentaire, on aggrave la situation de monopolisation.

Durant ces derniers mois, Microsoft et d'autres firmes se sont assurées des droits par des brevets sur les standards d'Internet et, de ce fait, le consortium genevois World Wide Web W3C a subi une épreuve de force difficile. Heureusement, ces brevets ne sont pas valables pour l'Europe.

Jusqu'à présent, les pays de l'UE avaient toujours strictement refusé la protection par des brevets de logiciels dans la mesure où il s'agit purement de matériel d'information et non de pièces d'appareils industriels. À l'opposé des machines, produits chimiques et autres objets tombant sous le droit de brevet, un programme logiciel n'est autre qu'une description formelle d'idées et de modes d'emploi comparable à un article scientifique. C'est seulement au second degré que l'on peut quasiment réduire ce pur produit d'information à un produit industriel en le rendant impénétrable et en limitant son potentiel de développement.

La sagesse de l'approche européenne de ne pas accorder de brevets aux méthodes de programmation s'est avérée juste ces dernières années vu l'importance croissante des logiciels à source ouverte. Des systèmes comme GNU/Linux, FreeBSD, etc. se sont développés en raison de la libre communication des experts dans l'Internet et se sont montrés supérieurs à beaucoup de produits industriels connus, grâce à leur efficacité et leur stabilité. Un nouveau modèle post-industriel du développement des logiciels a prouvé sa productivité supérieure et s'est déjà établi entre temps dans beaucoup de domaines de la vie publique.

Il n'est donc pas étonnant que certains grands fabricants de logiciels aux États-Unis soient soucieux face à ce nouveau développement auquel l'Europe participe à environ 50%.

Dans une analyse interne de fin octobre 1998, un stratège de Microsoft constate que sa firme ne peut concurrencer, au niveau de la qualité, les systèmes à source ouverte tels que Linux et Apache, puisque ces derniers "s'ajustent bien mieux" dans l'Internet. Ainsi, cet expert conseille à sa firme d'utiliser deux armes de l'arsenal de l'ancien mode de production industriel :

1. Elargissement/réinvention propriétaire de protocoles Internet

2. Application extensive de brevets aux logiciels

Les brevets de logiciels font aussi l'objet de fortes controverses aux États-Unis. Contrairement aux brevets industriels, ils ne servent guère à faire connaître des innovations, mais menacent l'inévitable innovation quotidienne telle une épée de Damoclès. Les entreprises spécialisées pionnières comme Adobe et Oracle ont exprimé leur opinion : "les brevets de logiciel sont plus étouffants qu'utiles pour l'innovation". Seuls certains géants de cette branche développant une stratégie de plates-formes générales sont en mesure de profiter de l'insécurité juridique due aux "brevets de logiciels".

Un renforcement de la stratégie de plate-forme pratiqué par des législateurs de l'UE causerait probablement plus de dommages que ce qu'un commissaire de contrôle de la concurrence de l'UE peut obtenir pour l'Europe en plusieurs années de travail consciencieux sur la protection de la compétitivité.

Vu l'urgence de cette affaire, nous vous serions très reconnaissants de nous répondre au plus vite. Nous aimerions surtout savoir ce que l'UE prévoit, qui nous pourrions encore contacter et qui pourrait être notre interlocuteur.

Nous vous souhaitons une santé de fer et une bonne inspiration pour le grand défi de votre fonction.

Sincères salutations

( Signature )

 


© Copyright 2000 Diamond Editions/Linux magazine France. - Permission is granted to copy, distribute and/or modify this document under the terms of the GNU Free Documentation License, Version 1.1or any later version published by the Free Software Foundation; A copy of the license is included in the section entitled "GNU Free Documentation License".